mardi 1 novembre 2011

Contes financiers pour nuit d’Halloween (132ème épisode)



31 octobre 2011

Conte européen

Sur les coups de quatre heures d’un matin lugubre, les représentants des 17 pays de la zone euro sont tombés d’accord dans leur désir, presqu’assoupis, sur un plan. Ils l'ont appelé « le non défaut de la Grèce ».

Les créanciers privés venaient de renoncer « en toute liberté » à 50 % de leurs créances. Dans le poème d’Edgar Allan Pœ, « chaque tison brodait à son tour le plancher du reflet de son agonie. ». Au quinté des bancocrates perdants, après les propres Grecs, 48,4 milliards d’euros, suivaient la France (9,6 milliards de pertes d’un trait de crayon), l’Allemagne (7,6 milliards € de mises sur le mauvais numéro), Chypre (5,8 milliards d’€), et la Belgique – 3,9 milliards €.

Ensuite, pour booster le Fonds de Stabilité Financière Européenne et recapitaliser les banques, vitamines et sels minéraux (9% de fonds propres, qui dit mieux ?), avec l’argent des autres, ils iraient trouver les nouveaux riches des BRIC, Brésil, Russie et surtout la Chine, et le Japon. Ils leur proposeraient de troquer des bons de papier contre rien, juste un taux d’intérêt.

Les enfants croiraient à la démondialisation.

Ardemment, ils désiraient le matin. Lorsque la lumière déchira la nuit, ce fut l’euphorie factice, générale, indescriptible. + 5% sur la place de Paris.

Le lendemain vendredi, on s’inquiétait de l’Italie dont le différentiel du coût des bons du trésor par rapport à ceux l’Allemagne s’obstinait à ne plus descendre en dessous de 6%. Les analystes tapotaient sans cesse sur leur calculatrice : le saignement des banques n’avait réduit la dette publique de la Grèce qu’...à 120% à l’horizon de... 2020 ; soit encore deux fois plus que la norme acceptable par le Pacte de Stabilité. Pourquoi si peu de résultats ? Parce que le FMI et la BCE, comme le diable ne concèdent jamais de remise de dette.


Dormez bien les petits. Jean-Claude Trichet se retire après avoir pendant huit ans présidé à la naissance et aux premiers pas de l’enfant Euro.


« Nous sommes l'épicentre de la crise la plus grave depuis la Seconde Guerre mondiale. » déclare-t-il en partant. Entre le nouveau gouverneur de la BCE : Mario Draghi, promotion Goldman Sachs (2002-2005), experts en maquillage de comptes grecs et ingénierie bancaire morte ou vive.

Conte d’Amérique de l’Ouest

Il neige sur Zuccotti square, mais Michael Moore n’est pas là. Il s’est rendu à Oakland pour soutenir les manifestants, brutalisés par la police la même nuit du conte européen. Un jeune homme de 26 ans, indemne après deux expéditions en Irak a eu le crâne fracassé par une bombe lacrymogène lancée à portée de main par un policier, alors qu’il était déjà à terre. A l’âge de l’iphone, l’histoire s’écrit avec plusieurs caméras. Il a fallu que la maire et la police cafouillent une explication devant les télés.

Le lendemain, le cinéaste parlait sur la Justin Herman Plaza. A San Francisco, nous sommes en pleine campagne électorale pour élire le maire. Le premier édile par intérim, Ed Lee se présente et les sondages le placent en tête ; sauf que rien n’est simple en Californie : les élections municipales se décident souvent au suffrage préférentiel. Il faut donc inscrire trois noms sur le bulletin, par ordre d’appétence et dans ce système, souvent c’est Poulidor qui gagne. En tous les cas, Ed Lee attend le résultat des urnes, le 8 novembre avant d’envoyer la cavalerie.

Tout en lui demandant de « montrer du leadership », ses opposants vont se faire prendre en photo avec les manifestants. Sur la Justin Herman Plaza, les slogans sont en anglais et en espagnol. La propagande varie entre anarchisme et luttes LGBT. Les jeunes se sont branchés sur l’éclairage public pour recharger leurs ordinateurs. Les chaines essaient de créer l’événement en parlant des toilettes qui débordent. David Chiu propose de les laisser faire leur sit-in, jour et nuit, aussi longtemps que nécessaire, mais qu’ils démontent leur tentes une fois par semaine pour laisser les employés municipaux faire le ménage.

A Portland, hier la police est intervenue de manière musclée.

Il existe actuellement plus de mille campements du mouvement Occupy Wall Street (OWS) dans le pays.

Gabrielle Durana

All rights reserved

Aucun commentaire: